LA PORTE D'ENSOR

CRÉATION 2024 THÉÂTRE DANSE
Texte . Marion Coutris. Mise en scène & Scénographie. Serge Noyelle. Composition . Marco Quesada. Patrick Cascino. Purcell, Monteverdi, Haendel.

Note de mise en scène
Jeune plasticien et metteur en scène, j’ai été fasciné par le tableau de James Ensor « les masques scandalisés » - 1883 – Une œuvre énigmatique, un tableau théâtral. Une porte s’ouvre, et apparaît un homme ou plutôt une femme, lunettes noires, un bâton à la main, un masque inquiétant. Devant elle, un homme est assis à une table, avec, lui aussi, un masque sur son visage, les mains posées à côté d’une bouteille.
Par la suite, ce tableau m’ouvrira la porte à d’autres peintres comme Magritte, Spilliaert, Delvaux, Munch... Et de m’apercevoir à ce moment-là que ces peintres nous proposent, sensiblement, une dramaturgie et une théâtralité. En retour, la théâtralité peut elle aussi suggérer une forme de peinture allégorique. C’est donc en hommage à James Ensor, que j’ai conçu cette création, qui représente un champ de liberté esthétique et l’opportunité de réunir 10 artistes, danseurs et danseuses, acteurs et actrices, chanteur lyrique et musicien.
Une porte s’ouvre et se referme. Des hommes habillés en noir entrent, et sortent. Il y a dans cet acte un secret, une étrangeté, une curiosité. Qui sont ces personnages ? Qu’y a-t-il derrière cette porte ? Comme toutes les autres, elle recèle un secret.
Puis cette porte s’ouvrira encore et défileront indéfiniment des figures cérémoniales, des cortèges, des visions parfois tragiques, parfois oniriques, ou drôles : toujours picturales.
Serge Noyelle




Un voyage imaginaire
La porte est aussi un seuil intérieur que nous franchissons pour traverser la frontière des genres.
Le masque posé sur chaque visage permet de figurer librement, indifféremment, les sexes, les genres, les expressions de l’humain : le masque dévoile et révèle. Il transgresse aussi le cadre social car ce seuil devient réversible : le travestissement et l’identité fusionnent dans un jeu des apparences, dévoilé, indistinct.
Entre la porte et la porte il y a un voyage imaginaire qui nous permet de nous déplacer depuis le conscient vers l’inconscient, et d’y accepter nos terreurs et nos désirs, comme en rêve. La porte est aussi un lieu en soi, où se déroule la fable. Spectateur, lecteur, on est souvent « devant la porte », celle qui distribue les pièces de la maison, la porte d’entrée du palais, la porte de la chambre, et cet entre-deux nous laisse à foison imaginer les actes parfois innommables, souvent « in-montrables » qui se passent derrière la porte.

Un théâtre de l'irréel
La Porte d’Ensor évoque peut-être l’énigme qui conduit le spectateur à l’univers du peintre, il est l’entrée d’un royaume étrange, c’est aussi le dedans et le dehors d’un petit théâtre, le symbole d’un passage secret vers l’incarnation de personnages masqués ou travestis, d’une identité vers l’autre. Quel est ce monde que l’on laisse derrière, dans la pénombre, lorsqu’on s’avance, méconnaissable, vers l’espace mis en lumière d’un intérieur artificiel, lui-même regardé par les yeux des spectateurs ?
Entre la porte et la porte il y a un voyage imaginaire qui nous permet de nous déplacer depuis le conscient vers l’inconscient, et d’y accepter nos terreurs et nos désirs, comme en rêve. Élément scénographique si souvent utilisée par les dramaturges classiques, la porte est aussi un lieu en soi, où se déroule la fable. Spectateur, lecteur, on est souvent « devant la porte », celle qui distribue les pièces de la maison, la porte d’entrée du palais, la porte de la chambre, et cet entre-deux nous laisse à foison imaginer les actes parfois innommables, souvent « in-montrables » qui se passent derrière la porte.
Mais le monde de James Ensor nous parle de la révolte des objets, de la mort, de l’enfance, ses rires et ses angoisses, de l’illusion sociale, d’une esthétique de carnaval noir, de la beauté d’une lumière qui jaillit des paysages.
C’est pourquoi, cheminant avec le peintre, sensibles à sa révolte intérieure, et à ses fulgurances, nous avons eu envie de parcourir et d’inventer des espaces mentaux si singuliers, pleins de douceur et de furie, attirants et effrayants, radicaux et populaires, grotesques et beaux : magnifiques d’humanité distordue. La matière dont est faite nos songes est la même dans le monde entier. Voilà pourquoi le théâtre qui met en jeu les corps, les musiques et les mots dans le cadre d’un espace scénique fermé, est le lieu de la métamorphose et des révolutions : mentales, esthétiques, sociétales. S’y rejouent encore et toujours le récit de nos vies, de nos amours et de nos peurs dans un tourbillon qui ressemble à un cortège de carnaval.
Marion Coutris

Distribution
Artistique
Texte et dramaturgie : Marion Coutris
Mise en scène et scénographie : Serge Noyelle
Régisseur général : Thibault Arragon de Combas
Lumières : Serge Noyelle & Cédric Cartaut
Vidéo : Cédric Cartaut
Son : Bastien Boni
Adaptation lyrique et accordéon : Rémy Brès-Feuillet
AVEC Rémy Brès-Feuillet, Marion Coutris, Pascal Delalée, Nino Djerbir, Andrés García Martínez, Camille Noyelle, Hugo Olagnon, Leonardo Santini, Geneviève Sorin, Bellkacem Tir
LA PORTE D'ENSOR

Bande sonore : Patrick Cascino (piano), Didier Lévêque (accordéon), Magali Rubio (clarinette), Marco Quesada (guitare), Charly Thomas (contrebasse), Monteverdi, Purcell, Vivaldi, Haendel .
Co-production Théâtre des Calanques et Groupe 444, soutien à la production Fransbrood Production (Gent)
Création créée au Théâtre des Calanques en mars-avril 2024.